Ma voisine veut déménager.
Pas pour un conflit de voisinage, pas pour un chien qui aboie de façon systématique, pas pour une histoire de zone inondable, non, tout simplement parce qu’une usine de laine de roche va bientôt démarrer pas loin de chez elle. L’origine de ce départ forcé, c’est Knauf.
Elle se pose la question suivante : si l’usine ne démarrait pas, quelles en seraient les conséquences pour l’environnement, pour l’emploi, pour elle ? Pour elle, c’est facile, elle resterait chez elle, continuerait son petit bonhomme de chemin qui, avouons-le, lui sied à merveille. Pour l’emploi, 123 personnes n’auraient pas le travail promis par Knauf. Le nombre est ridicule, ce chantage à l’emploi ne saurait excuser toutes les maladies futures générées par ce gros pollueur. Mais pour l’environnement ? Eh bien il aurait tout à y gagner. On ne dit pas que l’usine doit s’installer ailleurs, cela ne ferait que déplacer le problème. Elle ne doit pas exister ! On ne peut plus, en France, appeler au boycott. C’est bien dommage. Pourtant, ce serait une bonne méthode pour obliger le grand industriel, gros pollueur devant l’Éternel, multimilliardaire de surcroît, de proposer d’autres produits que la laine de roche.
Voici sa deuxième question : pourquoi les gens ne réagissent-ils pas ? Vous avez les fatalistes qui vous disent : « de toute façon l’usine se fera que vous le vouliez ou non. » Viennent ensuite ceux qui préfèrent se boucher les oreilles, ceux-là se boucheront bientôt le nez, quant à la vue, Knauf et ses deux cheminées, s’en chargeront… Puis vous avez ceux qui sont pour l’emploi, coûte que coûte, qui surenchérissent : « Moi je n’ai pas de famille, je suis tout seul, j’ai besoin d’un emploi, on paie bien chez Knauf, des conditions comme ça, j’en aurai nulle part ailleurs… » À ce stade, il est préférable de ne pas insister. Il faudrait dire à ceux enfin qui sont voisins « vigilants », qu’ils le soient vraiment. D’après le dictionnaire Larousse, est vigilant celui : « qui fait preuve d’une attention soutenue aux événements susceptibles de le concerner pour être prêt à se défendre contre toute atteinte éventuelle. » L’atteinte éventuelle, elle est là, elle s’appelle Knauf. Elle va vous tuer parce que justement vous vous êtes montrés voisins « négligents »… Si Knauf s’installe, il va forcément s’agrandir, une deuxième tranche peu de temps après sera l’occasion de s’étendre sur le site, d’autres usines tout aussi polluantes viendront par la suite. Un petit coin de Moselle qui ressemblerait à un gigantesque complexe industriel… Méditez donc voisins vigilants cette phrase d’Albert Einstein : « Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent agir et qui refusent d’intervenir ».
La troisième question, pourquoi tous ces élus se sont-ils mis d’accord pour donner leur confiance à Knauf ? En fait ils ont bien manœuvré. Préparé en catimini, deux ans auparavant, ce projet d’usine polluante, ils se sont bien gardés d’en parler autour d’eux. Tout s’est fait à la barbe des citoyens. La recette pour imposer n’importe quoi : un ex-député peu scrupuleux qui promet des subventions à ses subordonnés et le tour est joué. Ce qu’ils n’avaient pas prévu ces politiques, c’est notre association qui œuvre pour que l’usine ne démarre pas. Nous ne sommes pas des moutons de Panurge, Monsieur Weiten. Non, ma voisine ne déménagera pas !