Il n’y a pas de petite cause

J’étais le 28 avril à Illange, à la marche pour le climat et la santé. J’y ai cherché des connaissances, je veux dire : pas des gens que j’ai connus par l’association Stop Knauf Illange, mais des gens de mon coin, de Volmerange-les-Mines ou des environs, mais je n’ai trouvé que Stéph, avec son ami. J’y ai aussi cherché un vieux pote qui habite Illange ; en vain.

J’en connais pourtant pas mal qui sont éco-sensibles, voire éco-responsables, des qui ont tout lu sur les sujets de la nécessaire préservation de notre environnement, de la biodiversité, des ressources naturelles, des qui ont mis en pratique le zéro déchet et la frugalité énergétique, des qui se sont présentés à des élections sous l’étiquette écolo. Mais pas vus. Donc, un peu déçu.

Je ne reproche rien, remarquez. Moi non plus, je ne fais pas toutes les manifs. Je me suis dit qu’Illange était peut-être trop petit pour eux, que les grandes causes planétaires leur paraissent plus importantes que la lutte contre une simple usine à combustion de coke dans un petit coin de Moselle. Je me suis dit qu’on les verrait sans aucun doute à Metz, le 4 mai d’avant le G7 Environnement.

Ce qui fait qu’on n’est pas toujours très nombreux, c’est que l’écologie est un combat. Les combats, ça demande des efforts, et les efforts, ça fatigue. L’écologie est en outre un combat parmi d’autres. Et il y en a beaucoup ces temps-ci, des combats qui valent la peine qu’on monte au créneau. Alors chacun fait ce qu’il peut ; c’est sûr, on ne peut pas être tout le temps au four et au moulin.

Le combat écologique a en France déjà plus d’un demi-siècle et ce n’est qu’aujourd’hui, donc un peu tard, n’est-ce pas, peut-être même trop tard pour sauver certaines belles choses, que sa totale légitimité se voit confirmée, officialisée, médiatiquement, par les constats de catastrophe imminente que font les scientifiques dans tous les domaines qui intéressent la vie sur Terre. Et pourtant, et pourtant… il faut encore se battre pied à pied contre les sourds, les cyniques et l’obscurantisme.

Prenons l’exemple de l’air. Préserver la qualité de l’air qu’on respire, c’est important, n’est-ce pas ? C’est une nécessité, même, personne ne vous dira le contraire. Oui… mais non : préserver la qualité de l’air, ça ne va pas de soi, pas du tout même. Parce que tout le mouvement naturel de l’activité humaine, l’industrie en particulier, ne fait au contraire que le dégueulasser, l’air qu’on respire. Il faut donc aller à l’encontre du naturel.

Ah ! le cruel dilemme… que nos élus et décideurs, du plus petit niveau jusqu’aux sommets de l’état, ont résolu d’une manière fort simple, cynique et irresponsable : par devant, ils tiennent de beaux discours sur la qualité de l’air – sous la contrainte, parce que les gens (les électeurs) les poussent aux fesses – et par derrière, ils ne font presque rien, ou rien, ou font tout le contraire de ce qu’ils disent. C’est qu’ils privilégient toujours – par copinage peut-être ? – le business qui rapporte le plus et qui rapporte tout de suite.
À cet égard, l’histoire de l’implantation de l’usine Knauf à Illange a quelque chose de l’archétype, apportant la preuve que la santé de la population et la qualité de l’environnement ne comptent pour rien au regard de la production de bien et de bénéfices et de quelques emplois.

Il me revient en mémoire cet argument d’une personne que j’essayais de convaincre de rejoindre SKI, qui m’opposait que les gens qui manifestent contre Knauf à Illange ne le font que parce qu’ils sont directement concernés et qu’ils ne le feraient pas si Knauf s’installait ailleurs, loin de chez eux. Tu parles d’un argument !
Et quand bien même ! Est-ce une raison pour ne rien faire ? Pour les laisser se débrouiller seuls ? Évidemment, non. Et les gens directement concernés ont effectivement reçu du soutien de gens qui ne sont pas directement concernés.

Ce qui est sûr désormais, c’est que les anti Knauf d’Illange continueront de se battre contre cette saloperie d’industrie au coke, où qu’elle s’installe. Leur cause fait cause commune avec l’humanité entière. Il n’y a donc pas de petite cause. Le combat est autant sur le terrain que dans les hautes sphères. Si chacun partout résiste, il n’y aura plus aucun endroit sur Terre où de telles aberrations trouveront à s’implanter. Le reste suivra… naturellement.