À PROPOS DE (1) *

Philippe Coune (Knauf Insulation) sur France Bleu le 13 février 2020

L’entretien accordé à France Bleu par Philippe Coune le 13-2-2020 nous laisse songeurs [Transcription PDF]. M. Coune reconnaît les difficultés rencontrées dans le processus de fabrication, et c’est bien le moins puisque Knauf est sous le coup d’un arrêté préfectoral de mise en demeure daté du 31 janvier 2020. Il aurait été intéressant de savoir pourquoi de telles quantités de produits non commercialisables ont été produites. Si nous comprenons fort bien que l’on ne démarre pas une usine comme une voiture en bas de chez soi, la durée des essais semble fort longue, d’autant que Knauf a toujours dit être pressé pour répondre aux besoins pressants du marché qui ne peut vivre sans ses produits. Les résultats quant à eux sont carrément décevants voire inquiétants y compris pour l’entreprise qui semble elle-même ne pas s’expliquer la chose.

Nous rappelons qu’Illange est la première usine conçue par Knauf qui jusque-là s’était attaqué au marché de laine de roche en rachetant des entreprises existantes, souvent en difficulté, ou privatisées dans le cas des anciens « pays de l’Est » européens. Knauf a sans cesse clamé l’expérience acquise depuis 15 ou 20 ans dans le domaine. Il semble que la précipitation de vendre son isolation pour profiter au plus tôt d’une part des 14 milliards d’euros prévus par le gouvernement français, lui ait fait sauter quelques leçons du mode d’emploi. Knauf a d’ailleurs eu recours à des techniciens de son usine de Surdulica (laquelle n’est pas un exemple à imiter, selon la population du lieu) pour remédier à la situation et continuerait apparemment de recourir à leurs services.

Sur un autre plan, toutes ces usines rachetées fonctionnaient et fonctionnent encore au coke. Donc pour Knauf la question du combustible ne se posait pas : Illange fonctionnera au coke ou ne fonctionnera pas. Nous ne serions pas surpris que dans le « contrat » accepté par le Conseil départemental figurât, entre autres, cette condition sine qua non : c’est le coke ou rien. M. Leverton admet d’ailleurs que Knauf ne possède pas la technologie de la fusion électrique, contrairement à son concurrent (et leader du marché) Rockwool. C’est pour cette raison, pensons-nous,  qu’un autre procédé que le coke fut déclaré « inenvisageable » au cours de l’enquête publique.

Lorsqu’il est interrogé sur « les oppositions », donc sur Stop Knauf Illange, Philippe Coune répond : « Le problème ici c’est qu’ils ne veulent pas avoir une discussion ouverte avec nous et donc nous, nous le regrettons ». Le président de SKI, Guy Vignard, a rencontré le directeur de l’usine, M. Alain Rysman, à l’initiative de celui-ci le 25 octobre 2019, trois jours après l’inauguration de l’usine et en dehors de celle-ci. M. Rysman a dit vouloir trouver un moyen de nouer un lien d’information, malgré l’opposition frontale entre son entreprise et nous. Notre CA ayant donné son accord, une trêve dans la «guerilla» évoquée par le journaliste de France Bleu a permis cette rencontre de deux heures. L’échange fut courtois et ouvert, selon le rapport que Guy Vignard en a fait à notre CA. Une nouvelle réunion de quatre représentants de Knauf et quatre de Stop Knauf Illange, était projetée pour janvier 2020 sur les sujets qui motivent l’action de l’association vis-à-vis de l’usine Knauf, sous réserve de l’acceptation des responsables des deux parties. M. Rysman a indiqué qu’il avait rendu compte à M. Leverton, ce que M. Coune ignore peut-être puisqu’il ne mentionne pas ce contact. Entre temps M. Rysman a quitté l’entreprise Knauf et personne chez Knauf n’a repris le travail entamé. Il se peut même que l’initiative de M. Rysman ait quelque peu contribué à lui faire perdre sa place, nous l’ignorons.

Il est regrettable que Knauf n’ait pas été interrogé sur la quantité en pourcentage des rebuts de production par rapport à la production totale ainsi que sur le pourcentage de ces rebuts qui seront réintroduits dans le processus de fabrication. Car d’un côté nous lisons ou entendons que tous les rebuts de production et les résidus récupérés dans les filtres lors de l’entretien seront recyclés dans le cubilot après mise en briquettes. De l’autre les documents techniques remis à l’administration et l’arrêté préfectoral d’exploitation indiquent des quantités à recycler nettement inférieures à la réalité d’aujourd’hui. D’ailleurs le Préfet, au-delà de l’impératif de « rangement » et de protection dignes de ce nom des rebuts, accorde toute l’année 2020 à Knauf pour recycler ceux-ci.

Dans l’étude d’impact du dossier d’instruction présenté en 2017 et complété en 2018, ce sont 6,3 T/h (soit 28% des « intrants » alimentant le cubilot) qui sont annoncés comme étant recyclés dans le processus alors que l’ensemble des déchets produits en régime courant est de 9,3 T/h. Il n’est expliqué nulle part, sauf erreur ce qu’il advient de la différence de 3 T/h (9,3T/h – 6,3 T/h) résultant de ce ces données.

Aussi, lorsque M. Coune dit : « Notre objectif a toujours été de recycler au moins 20 % de notre production », nous remarquons un écart sérieux entre son affirmation et les données de l’étude d’impact et bien évidemment une distorsion notable entre la capacité de recyclage annoncée et la réalité d’aujourd’hui. Nous déduisons de ce qui précède que la capacité de recyclage déjà sous-dimensionnée pour le régime courant n’offre aucun potentiel supplémentaire pour les actuels rebuts de démarrage.

Enfin, Philippe Coune déclare que « Le stock du port d’Illange va être déménagé ». Très bien, mais il ne dit pas où ces rebuts vont arriver ni dans quelles conditions ils seront stockés. Et la question ne lui est pas posée.

* Il y aura dans les prochains jours un À PROPOS DE (2) relatif à l’article du Républicain Lorrain paru le 15 février 2020 (MM. Leverton et Scaglione, Knauf Insulation).