L’épidémie de Covid19 a fortement modifié nos vies sur tous les plans : individuel, collectif, social, professionnel, économique, culturel.
La période de deux mois de confinement décidé au printemps par les autorités a eu pour effet, entre autres, de distendre le lien social et de compliquer le fonctionnement de toutes les structures collectives au travail, dans les commerces et industries, dans les collectivités locales et, pour ce qui nous concerne plus particulièrement, les associations de citoyens, la nôtre en particulier, qui a dû repousser à septembre ou octobre l’Assemblée générale prévue le 26 mars.
C’est peu de dire que nous n’avons pas retrouvé nos pratiques d’avant cette crise sanitaire et que nous ignorons à ce jour si et quand nous reviendrons à la situation « d’avant ».
Dans le même temps l’usine Knauf d’Illange a dû cesser son activité de fin mars à début juin. Depuis sa reprise d’activité dans la semaine du 8 juin, nous constatons que Knauf ne semble pas non plus avoir retrouvé une situation normale : moins d’émissions de fumées diurnes, mais des émissions nocturnes de fumées sont régulièrement observées ainsi que des odeurs et des bruits métalliques (trémies ?), toujours de nuit ; l’énorme stock de produits non conformes ne semble pas avoir diminué, au port d’Illange entre autres.
Malgré le souci de transparence constamment rabâché par les dirigeants de l’usine et du groupe, Knauf ne livre aucune information à la population. Nous ne savons pas si l’usine tourne à 25%, 50%, ou autre pourcentage de sa capacité.
Il n’en va heureusement pas de même lorsque nous sollicitons régulièrement les services de la Préfecture de Moselle. L’administration relève, à chaque inspection ou presque, des manquements dont certains sont difficilement compréhensibles : certains équipements de mesure des émissions ne sont toujours pas en place, Knauf doit régulièrement fournir des plans de correction des manquements ou anomalies constatés ou même revient sur ses propres affirmations : le taux d’arsenic constaté dans les poussières, bien qu’apparemment inchangé, est désormais considéré comme normal puisque comparable à celui constaté à St Egidien, ce que Knauf Illange ignorait il y a peu…
Pour une entreprise dont le Commissaire-enquêteur jugeait en 2018 qu’elle maîtrisait son procédé de fabrication, cela pourrait faire sourire… si le sujet n’était pas si important pour notre santé à tous.
En plus des mesures (débit, concentration et vitesse) des substances émises dans l’atmosphère, Knauf est tenu de fournir à l’administration des mesures et contrôles des retombées atmosphériques dans un rayon de 4 km environ autour du site. L’administration a pris son temps pour analyser le projet présenté par Knauf et a demandé diverses précisions et corrections. Le plan de protection de l’environnement finalement validé comporte principalement :
- la collecte et l’analyse des retombées des oxydes de soufre, de 14 métaux lourds, des poussières avec microparticules PM10 et PM 2,5 ainsi que du phénol, formaldéhyde, benzène, chrome VI. Cinq stations de mesures seront donc implantées temporairement à Kuntzig (fait fin juin 2020), Yutz (Stockholm), Illange (Courts de tennis et écoles) ainsi qu’en un point « neutre », à Bertrange, car théoriquement selon Knauf hors vents dominants. Nous avons déjà dénoncé l’utilisation des données d’une station météorologique située à 27 km du site, ce qui nous fait douter de la pertinence des données fournies alors qu’une station météo existe à Thionville : une enquête publique sur la centrale de Cattenom a confirmé en 2019 que cette station de Thionville aurait pu/dû être retenue. Contrairement à ce qui a pu être compris et répandu par certains (dont l’ancien maire de Yutz), les stations de mesures ne sont pas des stations fixes mesurant en continu mais des stations mobiles, opérationnelles pendant quinze jours à un mois selon les retombées analysées, à raison de quatre campagnes par an.
- des prélèvements destinés à évaluer les impacts sur les fourrages (sur deux parcelles cultivées), les céréales (sur 4 parcelles cultivées) et les légumes des potagers (6 points de mesures), ainsi que l’analyse des bryophytes (mousses) qui, se nourrissant par l’atmosphère et non par le sol, stockent les produits présents dans l’air et sont donc appropriés pour l’analyse de ces produits (17 lieux de prélèvement et d’analyse des mousses sont prévus). Un calendrier des prélèvements a été établi, mais nous ignorons s’il a pu être respecté, à cause de la crise sanitaire d’une part mais éventuellement pour d’autres raisons. De plus, les résultats obtenus seront évidemment corrélés au régime de production de l’usine, donnée non connue comme dit ci-dessus. La question sera donc posée à l’administration.
Autre point quelque peu surprenant : les émissions de CO2. Knauf a soumis son plan de surveillance de ces émissions, mis à jour par rapport aux données du dossier de demande d’autorisation d’exploitation ICPE (Installation Classée pour la Protection de l’Environnement), en septembre 2019. Une visite d’inspection a eu lieu en novembre 2019. Des compléments ont été demandés à l’exploitant par l’administration, laquelle est toujours en phase d’instruction du dossier. Nous ignorons bien sûr les raisons d’un tel retard : est-il imputable à Knauf, à l’administration ou aux deux ? Toujours est-il que la lutte contre l’émission de gaz à effets de serre, tel le CO2, ne semble pas, dans ce cas précis, constituer une priorité…, à moins qu’il soit possible de considérer que le dossier initial présenté par Knauf était peu fiable, contrairement à ce qui nous fut affirmé.
Enfin, comme chacun a pu le constater depuis quelques mois, les conduits des deux petits émissaires E24 et E25 (théoriquement de la simple vapeur d’eau rejetée du granulateur) montrent une forte corrosion qui reste à ce jour inexpliquée. Knauf étudie les causes possibles de cette corrosion si rapide (quelques mois) et recherche une solution, nous dit-on…
À propos d’émissaires, nous avons constaté fin juin qu’une nouvelle cheminée, de section et hauteur médiocres si on la compare aux émissaires du cubilot ou Aval, avait été installée (cf. photos). Vient-elle en remplacement ou en complément de quelque autre émissaire peut-être mal conçu, ou est-elle finalement installée après avoir été abandonnée dans un premier temps ? Nous avons écrit à la Préfecture pour savoir si celle-ci avait émis ou allait émettre un arrêté modificatif des deux arrêtés existants (décembre 2018 et août 2019) puisque, selon nous, l’implantation de cette cheminée « imprévue » et, sauf erreur, absente de tout document d’instruction du dossier, doit être répertoriée et ses caractéristiques et usage doivent être connus, précisés, vérifiés et autorisés selon les normes réglementaires et certifications afférentes.
N’oublions pas non plus que nos deux recours, l’un contre l’arrêté préfectoral d’autorisation d’exploitation de décembre 2018, l’autre contre le permis de construire modificatif accordé par l’ancien Maire d’Illange en mars 2019 sont toujours pendants devant le Tribunal Administratif de Strasbourg. À ce jour, aucune date d’audience ne nous a été communiquée. Il est vrai que le TA traite probablement en priorité les nombreux recours contestant les résultats des dernières élections municipales.
Comme vous pouvez le constater, il se passe au sujet de Knauf à Illange plus de choses que n’en disent la presse, l’administration ou Knauf. La vigilance reste impérative car la communication de toute entreprise est, par nature et vocation, en particulier chez Knauf, de type vendeur, louangeur et glorieux, donc jamais critique, sauf si la reconnaissance d’une erreur ou d’une faute peut rapporter plus que son déni (ce qui n’est pas si fréquent) et cela fait belle lurette que nous savons ne pouvoir compter que sur nous-mêmes, c’est-à-dire nous tous, pour défendre notre droit à un air non pollué.
À ce propos, quand se réunira le prochain comité de suivi du PPA (Plan de Protection de l’Atmosphère) des Trois Vallées dont il est prévu au moins une réunion par an ?