L’écoblanchiment selon Knauf

Lors de la réunion publique du 11 septembre, Sian Hugues, la responsable communication de Knauf a présenté la laine de roche comme étant un « produit écologique » (voir vidéo ci-dessous). Sa justification était que l’utilisation de ce produit, un isolant thermique, permettait de réduire la consommation énergétique d’un bâtiment. Moins d’énergie consommée, c’est bon pour la Planète et donc c’est écologique !

La laine de roche est un produit écologique ! (Ecoblanchiment)

La laine de roche serait donc un produit écologique ? C’est ce qu’on nomme de l’écoblanchiment (ou Greenwashing en anglais).

Wikipédia en donne cette définition :  L’écoblanchiment est l’acte de transmettre au public des informations qui sont – dans le fond et dans leur forme – une présentation déformée des faits et de la vérité, dans le but d’apparaître socialement et/ou environnementalement responsable aux yeux d’un public ciblé. C’est un système de communication vaste et complexe destiné à faire passer une « mauvaise » donnée ou information pour une « bonne ». 

La tromperie est caractérisée par le fait que l’économie d’énergie est réalisée quel que soit le matériau utilisé pour l’isolation du bâtiment. La conductivité thermique de la laine de roche est équivalente à n’importe quel autre isolant : laine de de bois, de chanvre, ouate de cellulose, etc.

La présentation de Hugues n’était pas un dérapage dans une présentation « enthousiaste ». C’est une stratégie délibérée de la société de « verdir » ses produits.

Ainsi, dans l’étude d’impact, Knauf précise bien que « la fabrication de laine de roche représente par principe un processus à grande consommation d’énergie et de ce fait émetteur de gaz à effet de serre» Mais l’industriel précise aussi qu’« il semble nécessaire de prendre en considération le bilan global tenant compte des applications du produit fini et des limitations des consommations d’énergie engendrées par celui-ci dans l’habitat (et de ce fait de la limitation de gaz à effet de serre générée par le chauffage). »

Bilan global (selon Knauf) = énergie consommée lors de la production – énergie économisée pendant l’utilisation

Cette arnaque intellectuelle est également utilisée par les concurrents de Knauf. Certains s’en donnent à cœur joie : « La laine de roche : un produit de Mère Nature » ou « un produit naturel ». C’est fait avec des cailloux, alors vous pensez donc que c’est naturel, hein !

Mais Knauf n’est pas en reste puisqu’il va jusqu’à présenter le polystyrène expansé comme « l’isolant écologique par excellence ». Il est en effet composé d’air à 98 %… Plus c’est gros, mieux ça passe !
Knauf omet juste de mentionner l’émission massive de gaz à effet de serre lors de la fabrication.

Une sacrée référence, ce polystyrène, puisque dans l’étude d’impact déjà citée, Knauf conclut le chapitre bilan environnemental par : « Au global, le bilan énergétique et d’émissions de la laine de roche est meilleur que celui de matériaux isolants fabriqués à partir d’une matière première fossile et limitée qu’est le pétrole tel que le polystyrène expansé. » On n’est pas à une incongruité près…

(Lisez ce que l’écoblanchiment donnerait dans le transport routier avec notre article sur le GreenTruck)

D’après le livre de Jean-Pierre Oliva et Samuel Courgey, L’isolation thermique écologique qui fait référence dans le domaine, tous les matériaux ne se valent pas d’un point de vue environnemental et deux indicateurs sont souvent utilisés pour les comparer : le bilan carbone (c’est le bilan production/stockage de gaz à effet de serre de l’élément analysé) et l’énergie grise (c’est l’énergie non-renouvelable nécessaire à la fabrication du matériau).

Voici une étude comparative qu’on trouve dans cet ouvrage.

En vert, ce sont les isolants « puits de carbone » qui ont des bilans carbone négatifs. Ils capturent en effet le CO2 et assainissent l’atmosphère. A l’extrême droite, les produits Knauf en marron et gris qui dégradent le climat. Ecologique en effet…

En ce qui concerne l’énergie grise, le résultat est également très mauvais avec les deux produits phares de l’industriel toujours à droite du tableau.

Tous les matériaux ont aussi un « potentiel d’acidification » : certains gaz présents dans l’air, comme le dioxyde de soufre (SO2) et le dioxyde d’azote (NO2), se transforment en acides en présence d’humidité. Ils retombent alors sur terre, parfois très loin de leurs lieux d’émission, lors des épisodes pluvieux. Ils sont à l’origine des pluies acides, qui font diminuer fortement le pH des rivières, des lacs et des sols. Un pH insuffisant entraîne la disparition de certaines espèces végétales, la dégradation des sols concernés et des équilibres écologiques locaux ou régionaux.

Par exemple, la laine de roche est à 0,0141 kgSO2eq/kg et la ouate de cellulose à 0,00513 kgSO2eq/kg. C’est 3 fois moins.

Sur le site de production de Illange, Knauf prévoit d’émettre annuellement 280 tonnes d’oxydes de soufre et 100 tonnes d’oxydes d’azote dans un premier temps, car l’industriel ne cache pas son projet de doubler sa ligne de production.

Non, la laine de roche est un matériau du passé qui n’a qu’un avantage : son prix. Un prix faible en particulier parce que Knauf et ses concurrents ne mettent pas en place les technologies de traitement des gaz à la source. Ils préfèrent disperser les gaz dans l’atmosphère ce qui est moins cher.

Sa place disproportionnée sur le marché des isolants à la vue de son impact environnemental freine l’arrivée des véritables écomatériaux.

Son bilan carbone et son énergie grise ne font pas de ce matériau un « produit écologique » mais une véritable aberration écologique.

L’écoblanchiment pratiqué par Knauf est indécent face aux problématiques du réchauffement climatique.